Couleurs persanes

Par Francois Latulippe le  sous Aventures

À l’approche du Golfe persique, la côte iranienne montre ses palmiers et ses couleurs…

Depuis mon adolescence, le nom Bandar Abbas m’est familier – ma chambre était tapissée d’une immense carte du monde et mon oreiller se situait à l’endroit précis de ce port – et il a pris son sens cette semaine, alors qu’un vol depuis Mashhad me faisait traverser l’Iran du Nord au Sud. Une porte d’entrée sur un nouvel univers de l’Iran… différemment persan.

Mon instinct me guide vers l’île la plus vaste ; Queshm.

Pour y accéder, un «speed boat» est prêt à décoller. Parfait, j’y embarque ma carcasse avec une douzaine d’autres dans ce qui est en fait une barque à moteur ultralégère conçue pour lever le nez en l’air en prenant de la vitesse, et taper sur l’eau à la moindre vague traversée. Pour être clair, un vrai matraquage du derrière et du périscope (non, je n’ai pas croisé de sous-marin nucléaire américain) ! Je me réfugie aussitôt les bleus sur le dos coussiné de mon gros «pack sac».

Au retour, j’ai été patient ; attendre le gros bateau, plus lent, mais plus rassurant, en regardant les autres «speed boats» faire du slalom entre les bateaux cargos stationnés entre l’île et la côte.

Sur l’île de Queshm, la petite ville de Laft a encore un côté traditionnel, surtout en raison des tours-ventilateurs qui captent le vent et le conduit dans la pièce principale de la résidence pour garder l’air ambiant frais.

Presqu’au bout de l’île, les formations rocheuses sculptées par la mer affichent même un sourire.

Mais entre ses espaces naturels, la zone occupée par les militaires et sa ville principale, l’impression de transit me suit comme les gens de différentes origines qui traversent l’île avec leurs marchandises. D’ailleurs, Queshm est une zone franche, tout comme l’île de Kish, ce qui veut dire que n’importe qui peut y mettre les pieds, sans visa.

Et dans d’autres cas, avec beaucoup de patience, comme ces Indiens croisés à la boulangerie qui attendent depuis près de 3 semaines pour un visa de travail vers un des Emirats arabes, on espère en sortir ! Pour moi, ayant fait rapidement le tour, après 24 heures de séjour sur l’île, c’en était assez.

Puis un autre transit, retour à Bandar Abbas, pour me mettre sur la route de ma première motivation pour visiter cette région ; Minab, et son bazar (marché) du jeudi. J’arrive la veille pour m’y installer et faire un repérage du bazar en question. Tout près, j’y découvre un autre lieu plein de souvenirs d’adolescence ; un terrain de soccer. En bon amateur, je fais un détour au dépanneur faire des provisions pour aller encourager les deux équipes d’amateurs de la localité. J’ai l’occasion de rencontre le « Ronaldo de Minab», le voici sur la photo tout juste après une jambette bien servie à son adversaire… position qu’il a gardé pour la « pose ».

Enfin, jeudi, la carte-mémoire vide, les batteries pleines, je marche rapidement vers le site du bazar, comme si c’était mon premier jour d’école et que j’allais retrouver plein d’amis.

Oh! Voici une première dame masquée. Je me dirige droit vers elle, un grand sourire accroché derrière la lentille de ma caméra ; mon jeu non-verbal semble lui plaire et elle se prête à mon clic.

Ces masques sont appelés burqas et sont portés surtout par les femmes des villages de la banlieue de Minab. Une tradition vestimentaire des régions orientales et rurales du Golfe persique m’a-t-on dit.

Au bazar, j’essaie de me faire discret avec ma caméra… Bien que ma présence semble être acceptée, elle n’est pas ignorée ; je me rends compte que l’attention tombe sur moi rapidement après quelques minutes lorsque je reste immobile. Dissimulé dans l’ombre d’un étal ou d’un camion, j’obtiens de meilleurs résultats.

Je trouve une section particulièrement intéressante ; seulement des femmes qui regardent des pièces de vêtements traditionnels… wow!

Mais j’étais resté trop longtemps au même endroit…(scène presque réelle) Une dame jette son masque par terre, me pointe et montre son avant-bras musclé.

Mon oeil de tigre reconnaît là un défi ; mon (autre) oeil, de lynx, méfiant, regarde derrière et y voit l’attroupement des hommes occupés à marchander des poules à moins de 200 mètres. J’ai encore la voie libre… un sourire pour la dame, et je change de section…

Je me suis donc amusé pendant quelques heures à capter ces scènes de marchandage coloré.

Un dernier cliché ; à quelques 20 km au sud de Minab, les collines en dents de scie offrent un contraste de relief surprenant, à proximité du village de Kuhestak, quand la côte laisse apparaître une plage rocailleuse.

Un beau «Happy Ending» à mon périple, avec les Iraniens (hommes, femmes, enfants) qui s’amusent librement les pieds dans l’eau et quelques vaches qui déambulent, cherchant le bon endroit pour apprécier le coucher du soleil sur le Golfe persique… On dirait presqu’un clin d’oeil indien!

Et voilà, un aperçu de quatre semaines d’exploration en Iran, à travers ces lettres persanes.

Il y aura une suite, inch’allah (si Dieu le veut)!

François